Tuesday, August 31, 2021

Après les feux, la vie en noir et vert dans la réserve naturelle de la plaine des Maures

Une semaine après l'incendie qui a ravagé 7 000 hectares dans cette réserve naturelle du Var, des fumeroles sont visibles au pied des arbres calcinés. Des scientifiques et des bénévoles tentent toujours de sauver in extremis des tortues d'Hermann, une espèce menacée. Des touches vertes de végétation redonnent espoir.

Sauvetage de tortues d'Hermann dans la réserve naturelle du massif des Maures (Var) après l'incendie qui a brûlé 8 000 hectares.Sauvetage de tortues d'Hermann dans la réserve naturelle du massif des Maures (Var) après l'incendie qui a brûlé 8 000 h ectares. © Radio France / Célia Quilleret

Le sol est noir, l'odeur est toujours âcre, l'impression d'être dans un cendrier géant est saisissante. Même si des arbres ou des poches de végétation ont survécu, ce paysage désolant prend vite à la gorge. Le directeur scientifique de la réserve naturelle nationale, Dominique Guicheteau, donne les instructions aux bénévoles venus tenter de sauver des tortues. 

Après un rendez-vous à la Maison de la nature de Gonfaron, nous sommes en patrouille dans le bois du Roucan, sur la commune de Vidauban. "Vous allez baliser le milieu, prenez bien vos lampes, ne vous brûlez pas les mains", prévient le responsable, debout sur un véhicule, "si vous trouvez une tortue morte, vous criez 'Tortue' et si vous en trouvez une blessée, ou vivante, vous le criez aussi. On prend une cuvette, on la met dans 10 centimètres d'eau et rien que cela, c'est énorme pour la survie des bêtes déshydratées après feu".   

 Un bénévole mesure une tortue rescapée. Un bénévole mesure une tortue rescapée. © Radio France / Célia Quilleret 50% de taux de survie, un espoir pour les tortues d'Hermann

C'est le départ. Deux groupes se forment des deux côtés de la piste. Dans ce paysage désolant, Jean-Marie Ballouard, docteur en écologie et membre de la Soptom, la station d'observation et de protection des tortues et de leur milieu est là pour diagnostiquer les reptiles. Tout-à-coup, un bénévole aperçoit une tortue vivante, bien cachée sous une dalle. On ne la dérangera pas, elle restera là, comme depuis une semaine. Elle a dû en effet se réfugier ici pendant le passage du feu. 

Un peu plus loin, une autre apparaît, avec sa carapace jaune et noire, elle est en vie également. C'est une femelle. "Ce sont elles qui vont permettre à la population de se restaurer sur le long terme", se réjouit Jean-Marie Ballouard. "Toutes ces tortues doivent rester dans leur milieu, elles pondent plusieurs œufs chaque année, chaque individu a donc un impact fort sur la population", détaille-t-il.  

La veille, une cinquantaine de tortues avaient été trouvées, plus de la moitié étaient décédées. "50% de survie, c'est correct", commente-t-il, même si pour cet amoureux des tortues et de la biodiversité de cette plaine des Maures, "c'est un crève-cœur de voir tout cela". Et il tient à faire passer un message : "Il ne faut absolument pas prélever des tortues, elles sont trop habituées à leur milieu !"  

Le sol est noir, l'odeur est toujours âcre, l'impression d'être dans un cendrier géant est saisissanteLe sol est noir, l'odeur est toujours âcre, l'impression d'être dans un cendrier géant est saisissante © Radio France / Célia Quillere t Des décennies pour revoir un paysage similaire

Romain Garrouste, chercheur au muséum national d'histoire naturelle est venu également constater les dégâts. "En tant que citoyen, on est dévasté comme le paysage, et en tant que scientifique on l'est aussi car beaucoup de mesures avaient été prises par la réserve pour préserver ces espace. C'est une catastrophe écologique, même si certains de mes collègues ne le disent pas comme ça et pour revoir la végétation, il faudra attendre 20, 25 ans, ou même davantage", se désole-t-il.  

Pour ce chercheur très engagé dans cette réserve, la présence de cette tortue d'Hermann, vestige de la Préhistoire, est bénéfique pour tout le milieu car elle joue le rôle d'espèce parapluie. "C'est grâce à elle que la réserve a été créée, cela profite à toutes les espèces", insiste-t-il. Les tortues blessées sont accueillies dans la clinique vétérinaire du village des tortues à Carnoules. Elles sont soignées, hydratées avant de retrouver leur milieu naturel, peut-être en octobre.   

Un peu plus de 200 tortues ont été recensées en une semaine. Il y en aurait 10.000 dans la réserve. Les scientifiques et les bénévoles vont continuer leurs recherches, plusieurs jours. Ils vont également mettre de l'eau sous les dalles pour hydrater le sol et la faune rescapée. Le temps est compté pour sauver cette espèce menacée d'extinction.  

Sébastien Caron, vétérinaire soigne avec son équipe de la Soptom une quinzaine de tortues brûlées par l'incendie. Ici au village des tortues à Carnoules.Sébastien Caron, vétérinaire soigne avec son équip e de la Soptom une quinzaine de tortues brûlées par l'incendie. Ici au village des tortues à Carnoules. © Radio France / Célia Quilleret

Quant aux arbres, certains pourront se régénérer, comme les pins parasols, grâce à leurs graines, intactes, mais cela prendra des décennies. Les poches de végétation donnent de l'espoir, car la forêt méditerranéenne sait revivre de ses cendres, mais pour cela il faut la laisser tranquille.

Les deux tiers de la réserve naturelle de la plaine des Maures ont déjà brûlé, un "désastre écologique annoncé".

Les incendies du Var causés par un mégot mal éteint? "Ca m'arrive de jeter par la fenêtre", concède une automobiliste

Alors que les incendies dans le Sud on fait des ravages, des opérations de sensibilisation prennent place sur les autoroutes pour tenter de convaincre les derniers réticents à arrêter de jeter les mégots par les fenêtres.

Les incendies du Var causés par un mégot mal éteint? "Ca m'arrive de jeter par la fenêtre", concède une automobiliste © RMC Les incendies du Var causés par un mégot mal éteint? "Ca m'arrive de jeter par la fenêtre", concède une automobiliste

L'incendie le plus important de l'été pourrait avoir été déclenché par un simple mégot jeté près d'une aire d'autoroute. C'est en tout cas l'une des hypothèses envisagées par les enquêteurs pour expliquer l'origine du feu qui continue de dévaster le massif des Maures dans le Var depuis le début de la semaine.

Jeter son mégot par la fenêtre, un geste aux conséquences parfois dramatiques, mais dont les fumeurs n'ont pas tous conscience. Sur l'aire d'autoroute de Port Lauraguais sur l'A61, nous avons croisé Eve. Et c'est un geste qu'elle assume: elle jette parfois son mégot de cigarette par la fenêtre de sa voiture:

"Une fois de temps en temps ça peut m'arriver", concède-t-elle.

Un moment d'égarement que l'Ardéchoise de retour de vacances dans le Gers n'arrive pas vraiment à expliquer…

"Je me dis que c'est un peu stupide de le faire alors que d'habitude je le mets dans le cendrier. Mais du fait, je l'ai fait"

Vidéo: France : le violent incendie dans le Var toujours pas "fixé" mais météo favorable (Dailymotion)

Stéphane est un jeteur de mégot repenti. Depuis un an, il a décidé d'investir dans un cendrier portatif.

"En voiture c'est vrai que j'avais tendance des fois à jeter le mégot par la fenêtre. Donc je me ballade toujours avec ce petit cendrier. C'est navrant de voir des hectares de forêt partir en fumée à cause d'un simple geste de négligence."

"Pour vous donner un ordre d'idée, sur un kilomètre d'autoroute on va retrouver 100 mégots en moyenne"

Des cendriers portatifs, Marlène Carraro responsable de communication à Vinci autoroute en distribue aussi gratuitement pour sensibiliser les vacanciers fumeurs…

"Pour vous donner un ordre d'idée, sur un kilomètre d'autoroute on va retrouver 100 mégots en moyenne. Quand on voit l'actualité du moment et les risques d'incendies on se dit que c'est une nécessité."

Au total 6 opérations de sensibilisation comme celle-là ont eu lieu sur différentes aires d'autoroutes du Sud de la France.

>>> A LIRE AUSSI - Incendie dans le Var: la solidarité pour les sinistrés s'organise déjà

Un Sancerrois veut en finir avec les mégots

Ils sont responsables de nombreux incendies, polluent l’eau et l’espace public. Les mégots de cigarette restent très compliqués à éradiquer. Entre incivilité et manque de prévention, un Sancerrois souhaite élaborer une technique pour stopper la pollution causée par les mégots.

Raymond Jubert, ingénieur et responsable QHSE (Qualité, Hygiène, Sécurité et Environnement), à la retraite, reste actif pour lutter contre la pollution liée aux mégots. « Les mégots présentent plusieurs problèmes. Ils s’infiltrent facilement dans les nappes phréatiques, passent des égouts à l’océan et influencent négativement la biodiversité. C’est la première source de pollution des océans Â», détaille-t-il.

« Je souhaite fabriquer et distribuer des cendriers de poche pour inciter les fumeurs à ne pas jeter les mégots n’importe où Â», développe-t-il. Bien que ce dispositif de cendrier existe déjà dans le commerce, l’objectif est de le rendre accessible à tous.

Le projet fonctionne avec un système d’upcycling. Cette démarche a pour but de réutiliser des objets pour leur donner une nouvelle utilité. L’idée de Raymond Jubert, est d’utiliser des sachets de café en aluminium.Un premier prototype a été confectionné par un centre d’insertion professionnel local, PEP 18. Ce projet pilote a pour but d’être expérimenté dans le Sancerrois avant de s’étendre sur d’autres territoires.

L’État propose une filière pollueur-payeur pour remédier à ce problème. Les fabricants de tabac doivent payer une charge à l’Etat en contrepartie de la pollution des mégots. Puis, l’éco-organisme Alcome a un budget de 80 millions d’euros par an à redistribuer aux collectivités territoriales pour le nettoyage et le financement de projets de développement innovants pour la collecte des mégots.

« Ce projet s’inscrit aussi dans le développement du tourisme durable Â», certifie l’ingénieur. Distribuer des cendriers portatifs nomades est un moyen pour diminuer les mauvais comportements.Une démarche auprès des collèges est en prévision pour sensibiliser les jeunes aux méfaits de la cigarette et aux mégots pollueurs.

Benoît Lesaulnier

Cendrier, Devise - Argent 915 - Espagne - Fin du XXe siècle

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